• Lettre d'Amy à Fan - 7

    Lettre 7 - 15-05-2011 (c)

    Transmise le 15 mai 2011

     

    Ma très chère sœur,

     

    Je reviens d’un petit séjour à l’hôpital. Oh, rien de très grave, rassure-toi ! Un peu de stress, avec un peu de fatigue, et chute de plaquettes ; mon sang étant déréglé, je l’étais aussi, comme tu peux l’imaginer. J’ai commencé par des maux de crâne pour finir avec des plaques rouges sur le corps et des allers-retours permanents aux toilettes, n’arrivant plus à manger correctement sans tout régurgiter ensuite. Le bonheur. Finalement, ça a été direction les urgences, et les médecins m’ont gardé trois jours. J’ai eu le droit à une transfusion sanguine pour passer un peu moins de temps devant la télévision de ma blanche chambre.

    Du coup, les parents ont eu peur. Peur pour moi, c’est surprenant n’est ce pas ? Peut être que si tu n’étais pas ma sœur ou que si tu allais mieux, cela n’aurait pas été le cas.

    Nous avons toujours été toutes les deux de santé fragile. La moindre grippe ou gastro qui passait par les classes de l’école, nous pouvions être sures de la récupérer. Si ce n’était pas l’une, c’était l’autre. Et Maman a toujours eu beaucoup de mal à nous éviter de nous transmettre les microbes. Va donc faire comprendre à un gosse de 6 ans qu’il n’a plus le droit d’approcher sa sœur … Nous étions donc clouées à deux au lit. Le pire ? Cela nous amusait et nous plaisait. Pas d’école, rien qu’à deux, parfois avec une baby-sitter quand Maman avait vraiment trop pitié de nous. On jouait, on s’amusait, on était malades et on prenait notre pied. A une condition toutefois : dès leur retour, il fallait faire croire aux parents que nous avions passé notre journée à gémir au lit. Dans le cas contraire, ils piquaient une colère noire, assurant que nous aurions été tout aussi bien à l’école. Et dès le lendemain, c’était retour dans nos classes respectives. Au désespoir des institutrices qui nous voyaient transmettre nos microbes à tous nos petits camarades. En grandissant, cela nous est passé. Et heureusement.

    Aujourd’hui, c’est moi qui suis malade. La différence ? Je suis seule. Et je les fais réagir.

    Parce qu’aujourd’hui, toi aussi tu es malade.

    C’est l’avantage de la peur. Elle délie les langues. Merci Monsieur et Madame Wandern.

    J’ai réclamé ta présence comme un enfant réclame une pâtisserie. J’ai râlé, pleuré, gémit, grogné, soupiré, crié, en espérant que cela te ferais revenir plus vite. Je me rends compte aujourd’hui combien j’ai pu faire preuve de stupidité et surtout d’immaturité. Je râle parce que je ne comprends pas. Je suis capricieuse car je ne réfléchis pas. Alors promis, maintenant, je me tais. Et je t’aide. Je te soutiens. Si tu le veux bien.

    Maintenant, je comprends mieux pourquoi tu as décidé de partir en Allemagne. C’est vrai, nos grands parents sont tous les deux médecins. Et c’est dans l’odeur des produits désinfectants et des médicaments, entourés par le branle-bas de combat hospitalier qu’ils se sont rencontrés et aimés. Leur hôpital, qui en plus d’être leur nid d’amour est également le plus réputé de la région. Son nom est fait dans toute l’Allemagne. Alors oui, si tu es malade, et si tu es partie de la maison, là-bas, c’est peut être encore el meilleur refuge que tu puisses trouver.

    J’ai voulu venir te voir, tu sais ? Parce qu’en réalité, l’hôpital, c’est vendredi dans l’après-midi que je l’ai quitté. Le soir, j’avais déjà réservé mon billet de train sur l’ordinateur. Le croiras-tu ? Les parents sont encore des fouineurs. Une demi heure plus tard, un homme rouge de colère entrait par effraction dans ma chambre pour réclamer l’imprimé certifiant mon départ imminent. Vive les ordinateurs partagés, Internet et son historique de navigation. Maman a lourdement insisté pour que je ne sorte pas du week-end. Cloîtrée dans ma chambre. Comme si trois jours passés à être enfermée entre quatre murs ne m’avaient pas suffis …

    J’ai cru finir folle. Toi, malade, moi cloîtrée, coupée du monde entier. J’ai eu Canaille au téléphone. Elle m’a été d’un grand secours. Disons simplement que c’est elle qui m’a permi de t’envoyer cette lettre. Magouilles et compagnie, bienvenue dans ma petite vie !

    Tu me manques horriblement. J’ai peur pour toi. Tu vas mieux, qu’ils disent. Et depuis quand ? Pour combien de temps ? Cela fait trois mois que tu as migré. Autant de temps depuis lequel tu es souffrante ? Aurais-je un jour droit de connaître les réponses à mes questions, ou suis-je condamnée à me torturer l’esprit à trouver des réponses ?

    J’ai appelé chez Phil hier soir. Une certaine Virginie m’a répondu qu’il n’était plus là. Et qu’elle n’était que la locataire de son appartement. Il t’a suivie en Allemagne et espère ton retour. Non : votre retour. Je l’espère également. Et si je n’ai aucun moyen de savoir dans quel état tu es, au moins, je sais que tu es bien entourée.

    Je t’aime grande sœur. Porte toi du mieux possible.

     

    Ana.


    Post scriptum : Ma messagère aux cheveux platine me fait rajouter un mot de sa part. Elle t’embrasse et te souhaite bon courage. Courage ; est-ce grave au point que tu en aies tant besoin ? Quand je lui parle de toi, la sensible Canaille en a les larmes aux yeux. Moi, je refuse de les laisser couler. Pour moi, tu es toujours en pleine santé. Tout me parait si loin. Tu es si loin …

     

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